samedi 20 octobre 2012

Epuisée ?

L'épuisement est-il la négation du puisement ? Comme un genre de "ça y est, vous avez dépassé votre quota de puiser dans le monde, on ferme la source pour maintenant". Comme un genre de "le seau est usé, faut s'en aller".
Epuisée, c'est un peu fort, mais très très fatiguée oui. Parce qu'il faut à la fois penser le cours, le mener,   prendre les 31 élèves juste avec ses deux mains, et se débrouiller quand il y en a qui lâchent (en permanence donc) pour aller les rattraper sans perdre les autres, réfléchir à ce qu'on fait et à ce qu'on va faire, et puis anticiper, après, préparer, corriger, organiser pour finir la séquence avant les vacances. J'avais tellement confiance en ce début d'année,  je sens cette confiance s'erroder. Quand je constate que j'arrête de travailler au moment où je devrais être couchée, quand je réalise que je n'ai pas pris le temps de manger à midi, quand je sens les questions et les doutes qui reviennent. quand je me dis que neuf/dix heures de travail et une de transport, dans la même journée, ce n'est pas tenable ad vitam.

Mon rythme de vie a changé, me suis-je dit ce matin, vers 8h30 alors que j'avais l'impression d'avoir traînassé  Mais que le ménage, la toilette, et le pain perdu étaient faits. Il n'y a pas si longtemps, je vivais à moitié la journée et à moitié la nuit. Je "perdais" joyeusement mon temps, le distribuais dans le superflu essentiel à mon calme. Même en prépa, même en concours, je n'ai jamais connu ce rythme là. La petite fille en moi se rêvolte. Il n'est pas même dix heures et je songe à aller me coucher. Parce que d'une certaine manière, déjà, je suis épuisée. En rupture de stock. Il ne reste qu'à fermer boutique.

Pourtant, c'est là, au milieu de cet épuisement, de ce qui reste de mon trouble, que je souhaiterais écrire. Les carnets me tendent leurs feuillets incomplets. Les crayons frémissent sur le bois. Mais je me refuse, encore, parce que demain, il y a école. Paradoxalement, cette vie d'adulte me ramène a une sagesse et à une norme toute écolière. Merde alors.

Je pense à lui, dimanche, qui me disait en substance, de ne pas me remettre à plus tard, de ne pas me contenter de projeter ma vie sans jamais aller voir ce qu'il y a au bout du fil. De faire attention à ne pas me dissoudre dans les envies remises au lent demain. (un salut à l'élève de 6e qui fit cette trouvaille...). Des résolutions se tissent, pour n'abandonner ni l'enseignement, ni le reste. Une fois le fil tissé, on a le choix. Aller explorer le labyrinthe, ou rester là, et s'y pendre.

Je souris, en direction de l'ado en moi, celle qui a rencontré S. et découvert Antigone la première fois, cette ado qui sait que l'enseignement et le reste, tout est lié, par le fameux fil encore emmêlé  Et elle me rappelle, qu'elle veut "croire que tout est encore...". Encore, déjà, là.

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