dimanche 1 novembre 2015

Tessons et cailloux #14 : Autonome


Je crois que c'est définitif, je n'arriverai pas à vous raconter août. 
J'avais l'espoir de le faire mais tout a filé sans que je ne puisse m'accrocher à rien.


Il faudrait alors vous raconter septembre, la rentrée, le déménagement, les nouveaux endroits qu'on essaie d'investir en même temps, le lycée et l'appartement. Vous parler de la rue de l'Ambroisie, bien moins impressionnante que la rue d'Or, mais attachante autrement. Il faudrait vous causer des coïncidences folles, des présences d'ici et de là, de la vie qui continue de se tricoter, à tous les étages, du local à l'international. Des gens qui se rencontrent lors d'une crémaillère. De la bruyère et des objets chinés pour que ça ne manque jamais de couleur. Du vent qu'on laisse entrer. 
Il faudrait dire l'autonomie paradoxale de cet automne.
Il faudrait en dire les joies fondamentales et minuscules
Dire les questions qui tourbillonnent
Dire les belles luttes, quand il est grisant d'apprendre à boxer
La confiance
Lavis dense. Les vies dansent. 
Ou quelque chose comme ça. 



Mais, je ne sais pas comment vous raconter tout cela, septembre, la rentrée, le déménagement et tout ce qu'il y a au-tour-au-coeur. Comment le faire avec justesse ou finesse. Avec humour et simplicité. (L'écriture qui interroge toujours - Et cet espace là - Ce que je peux y dire ou en faire.). Préférer rester alors, à l'écume des choses, à effeuiller quelques impress(ensat)ions. 


Et nous voici déjà aux portes de novembre. 
Je vais être franche, si je croisais un jour le mec, la fille, la divinité, qui a eu l'idée d'inventer novembre, je crois que je sortirais de ma cordialité ordinaire. Novembre. Le mois rongé de brouillard, de nuits précoces, de conseils de classe. Le mois interminable par essence. Pourtant, "Brumaire", ça a quelque chose de beau. De cotonneux. D’enfumé et de protecteur. Quand on peut rester à l'intérieur avec un thé oolong au sirop d'érable et un bouquin. Dans un rocking chair. Brumaire. Bizarrement moins quand il faut enchaîner les copies, les bulletins et les réunions. 
Oui, novembre me fait frissonner. Peut-être parce que je sais à quoi m'attendre. Peut-être parce que la lumière. Peut-être parce que les morts qui soufflent leurs bougies. 

Alors j'essaye de me rappeler que, par conséquent, la saison du chocolat chaud est ouverte. Et qu'un instant, la brume n'existera plus qu'au dessus de la tasse brûlante. Qu'on y mettra des marshmallows ou des oursons en guimauve. Qu'on regardera des épisodes de Tintin, de Kaamelott, de Malcolm. Qu'on prendra trop de plaids et qu'on ira boire du café viennois là où la chantilly est maison. Qu'on fera des litres de Chaï latte, en discutant comme s'il faisait chaud. Qu'on jouera, en allumant toutes les petites lampes du salon. Qu'on mettra des bougies. Qu'on ira au ciné voir les blockbusters de l'automne et quelques films indépendants, quand même. Qu'on écrira, à côté de la nuit presque bleue qui court au delà de la fenêtre. Qu'on rira de nos cernes et de nos peaux transparentes. Qu'on réécoutera "Vespertine" et tous les albums mis en réserve au grenier. Qu'on sortira sur le balcon, avec une couverture sur le dos, pour regarder le ciel très clair des nuits glacées. Et que, blottis, comme ça, contre-tout-contre, novembre peut bien nous passer sur le corps, ça ira.