vendredi 8 décembre 2017

Lumières chroniques 5 : Lumignons

Décembre, enfin. 

Après novembre, qui fiche ses flèches et ses froids dans le dos, il y a un soupir de soulagement à arriver au seuil des cembres. 

Les villes s'illuminent, et au delà de mon agacement électrique, quelque chose trouve dans ces nuits pointillées de guirlandes, un certain réconfort. Alors si ça tombe plus tôt, le noir, sur le nez ou les ciels, on s'accroche aux lampions qui jouent à l'été. On s'approche des festivités. 

Des balades en forêt pour respirer mieux, le nez dans le vent, les cheveux en bataille, et des feuilles dans le cou. Des branches auxquelles s'accrocher, des hérissons à apprivoiser. Et danser avec un tronc, la joue contre l'écorce, les lèvres contre l'aubier, le coeur tendre à sculpter. 


Décembre, enfin. 

Retourner au théâtre. Des histoires de femmes. Des femmes artistes, peintres, écrivains. Des histoires de femmes puissantes et fêlées, de femmes au ventre creusé. Des histoires d'exécution, de perte. Des histoires d'amour, de familles. Des femmes entières, debout, tenues par la nécessité de dérouler le fil, de creuser les vérités, de traquer les absences ou les horreurs. Des sorcières, comme les autres. 

Rire autour d'un verre de blanc, avec les copines, en parlant de la fête qu'on veut se préparer sur mesure. Se donner des nouvelles, une tasse à la main, en fin de semaine. Manger des manalas sous les petites lumières du salon pour fêter la St Nicolas. Enrouler les conversations autour du dimanche midi, en fin de marché. 

Le 8 décembre, dans n'importe quelle ville, je mets des lumignons derrière les carreaux. En partant au théâtre je guette les rebords de fenêtres pour apercevoir un signe des lyonnais illuminés. L'agitation de la ville me frôle à peine. Je me sens au dehors. Quand la pièce est finie, je rentre comme je suis partie, en dehors et les yeux rivés au bord des fenêtres. L'oeil moucheté de rouge en plus. J'ai le texte dans mon sac. En rentrant, j'ajoute de la lumière à la lumière. Je regarde les flammes vaciller dans la nuit glacé. Je pense peu à Marie, à vrai dire. Mais je pense aux absents. Et je pense aux espoirs. Je pense à toute la gratitude que je ne sais pas à qui envoyer. Je prends l'occasion de poser au bord de la fenêtre ce qui reste habituellement au dedans. Et je rends à la nuit un peu de la chaleur et du réconfort qu'elle m'inspire par ces offrandes vite soufflées. 

Je sais qu'au loin tu poses toi aussi, des bougies, et l'idée me réjouit.  

Il va falloir dormir, que tout puisse reposer, dans ce réconfort enfantin de savoir que les veilleuses sont allumées.