jeudi 3 mars 2011

Once upon a time

It's been a while. A wee while but still. 

Je pourrais vous parler de mes élèves, du carnaval, de ce début de vacances. Je pourrais vous parler de coïncidences. De retrouvailles diverses. Des cauchemars. Mais non. Na. 

J'ai envie de partager des bribes de souvenirs qui me reviennent et me donnent à écrire. A lire et à relire le présent un peu différemment. 
Je ne sais plus exactement quand j'ai eu l'idée de ce post, je ne sais plus exactement où non plus.  Et je ne sais plus ce que je voulais y mettre à l'origine. C'est venu comme des bouts de super8 dans le quotidien. Même si à la maison y'a jamais eu de Super8. 


Dans la cabane de Sch. s'est établie la Loi du Sirop : un sirop, ça va, mais c'est un peu banal. Deux sirops, ça peut devenir tellement plus intéressant (si on se plante pas dans les dosages). Trois, c'est à bannir, quels qu'ils soient. Finalement, même deux sirops, j'ai jamais réessayé depuis la mini table en plastique.

Au lycée j'écrivais aux amies des mini-scenarii où elles finissaient enfin par "sortir" avec le Tik- (je peux pas vous donner le nom de code en entier, ce serait une grave trahison même six ou sept ans après) de leurs rêves.  Les Tik-. Le mot me donne l'impression de revenir aux gloussements du C.D.I, aux Darks Pa, à Bandeau. Dans ces scenarii, il y avait autant de fantasme réalisé que de private joke, d'amitié, de "hé, désespère pas, je suis là". Il y a le jour où K. m'en a fait un aussi. Elle lui avait attribué un costume d'aviateur. Sacré Lui. Ça m'a autant touchée que le jour où elle m'a dit que j'avais la beauté décoiffée, emmêlée des héroïnes du XIXè. Elle fait partie de celles qui avaient vue en moi la femme quand je faisais tout pour ne pas l'être, qui avaient compris bien avant moi qu'être féminine ça n'avait rien à voir avec des histoires de jupe, de cheveux coiffés, de maquillage - rien à voir avec les magasines "féminins", en fait. Je ne sais pas encore comment mais je suis sûre que ces deux souvenirs résonnent bien ensemble.


J'étais étendue sur l'herbe entre les deux chapiteaux du festival. Je hurlais de rire, me tordais sous les chatouilles (gros talon d'Achille). Je sentais tout ce qu'il y avait de vivant en moi. La même semaine, ma tête sur son ventre me paraissait si lourde. La même semaine, on revendiquait un statut de déchet de la société, on en riait pour pas en chialer. La même semaine, tôt le matin, dans la lumière, sur le plancher du préfabriqué, j'ai eu la trouille, j'ai fais le choix de dévier le slow, de faire la con. Apprivoisement du corps. Douceur et tristesse des préfabriqués.


Ma première amie s'appelait Alice. Et puis il y a eu des copines. Un jour Sch. est arrivée. Elle était nouvelle. on est repartie avec elle et Di. main dans la main vers le portail de la cour des grands. C'était il y a environ 18 ans. J'y ai pensé en arrivant devant son portail.


Je passais dans le couloir du bâtiment A avec K. et les autres. Lui, vous savez, "l'aviateur", était là entouré de quelques gars. Pas n'importe lesquels, de gars. De ceux avec qui nous partagions une réciproque hostilité. Passée devant lui comme si mon regard ne s'était pas attardé une seconde de plus, que j'avais pas zoomé un instant de trop. K. avait remarqué que quand je le croisais, je commençais à baisser la tête puis, vexée de me laisser abattre aussi facilement, je la remontais fièrement pour décocher, à qui croisait ma route, un regard de pierre. Bref. Nous passions. Descendions l'escalier. Et puis arrivée en bas, j'entends résonner dans la cage un "Geai" interrogateur. Du genre qui veut dire "Geai, attends 5 min, tu veux bien, je peux éventuellement peut-être t'adresser la parole ?".

Je vous la fait à l'américaine -même si vous avez déjà un peu compris ce qui va se passer.

L'aviateur était en haut des marches. Moi en bas. Les amies avaient respectueusement avancé de quelques pas pour ne pas s'imposer façon "troupeau" (mais pour pas louper une miette de l'histoire non plus).  Un ange passe (ce qui a un certain piquant quand on sait que pour des raisons de connerie collégienne l'aviateur avait un temps été surnommé "angel" par la Pix...). L'impression d'être dans un mauvais film cucul me submerge un instant avec, je dois bien le dire, une certaine joie. 
"Tu vas au bal du lycée ?" (Oui, j'étais dans un lycée où il y avait un bal. Non, rien à voir avec les séries américaines. Non, ce n'est pas le propos). 
- Heuuuu... ouai, m'entendis-je répondre, hébétée sous ces connards de feux d'artifices qui éclataient partout en même temps dans mon corps et dans ma tête. (ndlr : ahahahahahaha sacré adolescence)
Bon la suite est tellement plus originale. Sa question n'avait rien à voir avec une quelconque invitation puisque la notion de cavalier/cavalière était absente de notre bal à nous. Il s'agissait de questions logistiques, de voitures des parents et de villages à la con. D'aller, de revenir du bal ensembles. Pratiquement. Mais quand même il m'avait demandé si j'allais au bal. Et ça compte moins de dire "ça, c'est fait", que de me rappeler un instant d'espoir, d'hallucination complète. Et ce sourire, tout juste avant de me tourner. Le regard qui s'agrandit, la surprise. Je n'ai pas été déçue, au contraire. Il y eut l'intuition que je n'étais pas la seule à avoir zoomé un instant de trop. J'étais un peu comme Knox Overstreet ("The point, Charlie, is... that she was thinking about me"). Moins seule dans mon radar à aviateur. On partageait peut-être tout ce qui se cachait derrière notre air détaché.
The point, Charlie... the point...
- Note pour la suite: certes, je ne m'appelais pas Geai à l'époque, mais je tiens à l'idée de pseudonyme. 

Un des exercices d'expression écrite du CM2 consistait à inclure une phrase tirée au sort dans un texte en faisant en sorte qu'on ne puisse pas deviner laquelle. La mienne c'était "Il demanda le catalogue de l'outillage sur un ton aimable". Enfin je crois. J'avais écrit une petite nouvelle qui s'appelait "Abri à bois". Je me rappelle des rires enthousiastes et de ceux qui se sont arrêtés, en sortant en récré, pour me dire que c'était super ce que j'écrivais. Rayonnement.

Il y a eu une nuit, dans une ville que j'aime, où je suis rentrée seule, à pieds, sous la pluie, pendant une heure. Où j'ai hésité à rentrer chez moi, à tomber sur la route, à me laisser glisser contre un buisson.  J'étais si proche d'abandonner. Il y avait une chanson, répétée à l'infini, jusqu'au bout de la douleur. Pendant une journée entière. Le presque Rien. Un lit et une berceuse. Je la chante parfois. Personne n'a su. Personne ne sait.


On a passé du temps à discuter sur la fenêtre de la cuisine. A devenir proches. Petit à petit, loin des rires. A parler. Jusqu'à ce qu'un deux ou trois autres viennent se joindre à nous, à notre calme. A la cuisine. A nos ombres sur la fenêtre. 




Un jour, j'ai glissé un coeur en pâte à sel dans son cahier de brouillon. Signé. Il ne m'en a jamais parlé. 
Un jour où il était à côté de moi en classe il s'est retourné et m'a dit "I love you". J'ai dit "quoi ?" comme si je n'avais pas entendu. Et il s'est rattrapé "rien, je rigole". Vlan, dans ton ventre gamine.
Récemment, je me suis rendue compte que c'est à l'époque que j'ai commencé à écrire. Dans ma tête et puis sur de vieux agendas donnés "pour jouer". Outre le tube méconnu qu'est "Tip Top les vacances" je crois que c'est à cause de lui que j'ai commencé à écrire. Que j'ai continué. Il a progressivement disparu, l'écriture est restée. 
Thiéfaine vient de sortir un nouvel album. Ça me rappelle quand j'écoutais Tout corps  vivant branché sur le secteur étant appelé à s'émouvoir sur une vieille cassette. Petit à petit le reste. Et puis. Il m'arrive de fredonner "Exercice de simple provocation" ou "113è cigarette sans dormir". Parmi les choses qui me restent à faire : prendre l'ascenseur de 22h43.
 Au ski avec les garçons, on avait entendu un jour sur le télésiège un gars qui chantait "Crème Nivea, si tu étais là". C'est tout ce qu'on avait capté. On en avait réécrit toute une chanson. J'ai appris plus tard qu'elle existait déjà et qu'il s'agissait d'une paillarde. Avec les garçons on avait aussi fait une pièce de théâtre, quelques Jacadi et on hurlait "C'est le lion de Cléôôôôpââââtreuuuh c'est le roi des animaux" en glissant.
Asterix et Cléopatre que je regarderai longtemps plus tard avec une certaine citrouille dans notre appart' commun  où les moments de cuisine à quatre mains étaient souvent accompagnés par "le pudding à l'arsenic". "Et un peu de sucre en poudre ? Nooooooon !" 
Un jour lors de mon premier séjour en Irlande, j'ai pris une photo. Plutôt chouette. Plutôt simple. Six ans  dont un à Dublin plus tard, je m'aperçois qu'il y avait dans cette photo ce qui allait devenir un projet de vie à part entière. C'est fou, non ?



4 commentaires:

Lucie a dit…

c'est des instantanés. pas des soupes, mais des instantanés quand même. c'est bizarre comment le lien se fait d'une pensée à l'autre, d'un souvenir à l'autre. je crois que c'est là que se cache la poésie.
merci de venir me lire et de me faire signe. ça me fait toujours plaisir. et c'est indépendant du plaisir que j'ai à te lire toi, et à venir te commenter.
la vache,ça m'a un peu mélancolisé tout ça... :)

Geai a dit…

Merci Lumi ! Ca me touche beaucoup.

Il y a peu de blogs que je suis régulièrement. Qui me font sourire, qui me serrent la gorge, qui me plaisent. Qui me donnent envie de dire "j'aime ce que tu écris". Le tien en fait partie. Alors j'espère que tu sais que pour moi aussi, mes virées sur la glouberie sont indépendantes de tes visites ici.

Sorry pour la mélancolie, j'étais d'humeur ailleurs, mais ça m'aide pour ici ;)

Bonne soirée

Lucie a dit…

bon ben tout va bien, alors...

puis je vois que tu m'a boglistée, ou quelque soit le terme formidable qu'on a inventé pour dire ça.

ben chouette alors, c'est mon deuxième lien sur la blogosphère ! je suis fière comme paonne.
:)

à bientôt

(ya des poèmes à écrire avec les mots inventés par le vérificateur d'êtres humains là dessous, je te jure)

Geai a dit…

Hannnn mais c'est "ouf guedin trop frais" (lycée ô lycée)
Je viens de passer chez toi et de réagir à fond les ballonettes et voilà que je passe voir ici comment ça se passe et que, hop, un petit mot. Y'a des jours où tout se croise c'est vraiment... trop chouette !